Formule tout compris

Formule tout compris est une petite histoire érotique que j'avais écrite pour un appel à textes de la Musardine. Elle n'a pas été retenue. Je l'ai mise un temps sur mon ancien blog, puis l'ai intégrée au recueil de nouvelles que j'ai autoédité, Le sexe est une folie (encore disponible sur smashwords et d'autres plateformes de téléchargement comme Kobo). Je vous propose à présent de la lire à nouveau (ou de la découvrir) :


Vendredi 24 décembre, 11h30
Sale journée. D’abord, il fait un vrai temps de décembre, avec de la neige comme on n’en attendait plus, des trottoirs qui glissent faute de sel, des chaussées couvertes de gadoue. Et puis c’est la veille de Noël... Si la chaleur humaine et les bons sentiments sont l’apanage de la journée de fête, auparavant il faut compter sur une recrudescence d’indifférence et d’impolitesse. Le 24, c’est clair : on est là pour se faire piétiner dans les magasins, pour dilapider son argent et pour se faire gruger alors que l'on espère une affaire.
La journée s’annonce mal : midi approche, je vais essayer de grignoter deux heures sur la pause déjeuner pour trouver le cadeau idéal pour mon mec, deux heures et c’est tout, car le boulot m’attend, que je dois aussi faire bonne figure à une petite sauterie imaginée par le patron avant que je ne puisse regagner mes pénates et enfiler mon tablier de cuisine pour me farcir la préparation du réveillon. Et avec ça, il faudra être fraîche et pimpante.
Je me surprends à râler, assise à mon bureau, comme si la morosité du temps m’avait gagnée, moi aussi. Enfin quoi, c’est Noël ! On se bouge, on sourit...
11h50
Ultime appel de la matinée. Je raccroche et me précipite sur mon béret : il est grandement temps d’arpenter les magasins. Évidemment, tout le monde a la même pensée, les mêmes impératifs : trouver le cadeau idéal à la dernière minute. Et je me maudis, comme tous les ans, de ne pas avoir anticipé, de ne pas avoir fait mes achats sur Internet, de ne pas savoir que choisir, de n’avoir aucune idée de ce qui lui plairait. À chaque Noël, à chaque anniversaire, même galère. Et cela fait trois ans que nous sommes ensemble. Que pourrai-je trouver ? Le jeans bien coupé et les baskets de marque, soit. Des polars pour sa bibliothèque. Quelques gadgets numériques. Combien seraient-ils à se reconnaître dans ces goûts ? Éric est pourtant différent des autres, il a des trucs bien à lui, une façon de choisir la bonne bouteille de vin pour accompagner le plat qu’il a préparé, une façon de rire, une façon de me regarder qui me file des papillons dans le ventre, bref, ce n’est pas un parmi les autres, c’est lui, et je peine à trouver un cadeau qui se démarque des autres. Qui lui montre que je tiens à lui. Parce que je me mets la pression à cause de ça : je veux lui montrer qu'il est l'homme de ma vie. Trois ans et c’est toujours l’osmose. Cela ne m’était jamais arrivé auparavant.
Il est midi et c’est la cohue, comme prévu. J’entre dans le centre commercial et me retrouve plaquée sur des escalators contre une femme aux fortes hanches qui tient son poupon dans une écharpe.
« Et si on faisait un bébé ? » J'ai bien pensé à cette offre, j'y pense depuis plusieurs semaines, mais serait-ce un cadeau d'entendre ça ? Sera-il prêt ? J'ai peur de me planter royalement.
Je passe devant les boutiques au pas de course. Rien, encore rien, toujours rien. Je m'arrête un instant devant une agence de voyages et sur une affiche, je lis : « Week-end en montage, location de chalet, formule tout* compris ». J'écarquille les yeux pour lire en petites lettres ce que suppose l'astérisque. « Verre de bienvenue, location de skis, forfait remontée, fondue savoyarde et autres surprises. » Destination : Les 7 Laux, versant ouest - Prapoutel. Ce court séjour a lieu dans trois jours. Étant donné qu'il s'agit d'une offre de dernière minute, le prix a été revu à la baisse. Une occasion à ne pas laisser passer !
Je ne tergiverse pas, c'est le cadeau idéal : un week-end à respirer l'air pur de la montage, deux jours pour se détendre ! De plus, Éric adore skier. À notre retour, ce sera peut-être le bon moment...
***
Vendredi 27 au soir
Après trois heures trente de voiture dans des conditions météorologiques acceptables, compte tenu du sale temps dont nous avons bénéficié depuis le 24 décembre, nous arrivons au chalet. Comme prévu, un verre de bienvenue nous est servi. Florent, chargé de l'accueil par l'agence de voyages, a ouvert la porte, nous a confié les clefs et nous prévient que les deux autres couples sont déjà arrivés. Deux autres couples ? Je tique, mais ne veux pas faire un esclandre, de peur de ne pas avoir lu suffisamment attentivement les petites lignes du contrat de location. Je croyais qu'on serait seuls... J'ai dû conclure si vite l'affaire pour ne pas être en retard au bureau ! Et puis que va penser Éric si je lui dis que je me suis trompée ? Je reprends bonne contenance, réponds que nous serons enchantés de rencontrer les deux couples présents ce week-end. La fondue offerte par l'agence nous réunira autour de la grande table. Ce n'est pas au cours de ce dîner que je trouverai l'occasion de préparer le terrain pour le bébé...
Je pose en vrac des affaires sur une étagère, prends une douche rapidement et descends dans le séjour. Éric a déjà fait la connaissance des locataires, il m'accueille d'un « et voilà Camille ! ». Chacun décline à son tour son identité. Je fais la bise à tous. Il y a Alice et Thibaud d'une part, Zoé et Martin d'autre part. Des couples de notre âge. Cela aurait pu être pire ! Les quatre vacanciers ne sont pas antipathiques, à première vue. Et puis nous ne sommes pas obligés de les avoir tout le temps sur le dos : une fois la fondue terminée, ce sera chacun chez soi.
Je retrouve en partie ma bonne humeur, volatile en cette période de fêtes. Nous prenons place à table. Au milieu trône le récipient à fondue. Nous plongeons nos piques dans le fromage gluant. Avec ce type de plat, on ne sait jamais très bien ce que l'on mange. On peut nous faire croire que c'est du Beaufort ou du Reblochon premier cru, quand ce ne sont peut-être que des chutes de fromage périmé.
« Camille ? T'en dis quoi ? » Je sursaute. Je n'ai rien écouté, perdue dans mes pensées sur les qualités douteuses du fromage. Je ne me sens pas dans mon assiette. La fatigue du voyage, sans doute : j'ai préféré tenir le volant tout le long, parce que la conduite d'Éric sur autoroute me fait flipper.
Éric vient à mon secours : « Alice a perdu son morceau de pain. Il lui faut un gage, c'est la tradition ! Thibaud propose quelque chose d'un peu coquin... »
En l'occurrence, Alice doit mimer une fellation. Je n'y vois aucun inconvénient. Tant que ce n'est pas moi qui dois le faire !
Alice, prise d'un rire nerveux, met quelques minutes avant de se calmer et de commencer son mime. Elle arrondit les lèvres et sort sa langue. Elle me semble ridicule.
« Attends ! Ce serait mieux avec un objet ! » dit Thibaud.
On fouine dans les placards. Éric trouve une queue de casserole amovible qui a la forme requise. Il la tend à Alice qui recommence à glousser. Mais fichez-lui la queue dans la bouche, qu'on ne l'entende plus ! Alice s'en empare enfin et commence à la sucer. Nous avons tous les yeux rivés sur elle. Elle salive beaucoup, fait couler sa bave sur le manche, l'embouche, creuse les joues... Cela semble soudain moins ridicule. C'est à la fois crade et assez excitant. Le manche est englouti, réapparaît. Alice fait de longs va-et-vient. Elle aime apparemment se donner en spectacle.
« J'en aimerais bien une comme ça ! » déclare subitement son compagnon.
Alice réagit au quart de tour. Elle pose la queue de casserole et se dirige vers Thibaud. Mais, elle ne va pas le faire tout de même ! Pas devant tout le monde ! Et personne ne dit rien !
Non seulement personne ne dit rien, mais on se penche, on s'approche pour mieux voir, on fait cercle autour d'elle et je ne fais pas exception. Alice ôte le bouton qui ferme le pantalon et descend la braguette. Puis elle glisse sa main dans le slip, soupèse les couilles, prend le temps de les palper sous le tissu. Chacun est suspendu à ses gestes. Alice extirpe alors une verge gonflée, bleuie par les veines qui la parcourent. C'est un outil de belle taille, sans commune mesure la banale queue de casserole... C'est pour cette raison que cela lui a semblé si facile tout à l'heure ! Elle doit avoir l'habitude des gros gabarits qui lui déforment la bouche !
Alice approche alors ses lèvres de l'instrument et pince le prépuce du bout des lèvres, bécote le gland. Des petits préliminaires frustrants. On attend davantage ! Qu'elle s'y mette vraiment ! Enfin, elle embouche la verge entière. Pour que l'engin s'y sente à l'aise, elle écarte grand les mâchoires. Thibaud se cale sur sa chaise et soupire de contentement.
Sans lâcher des yeux la turlute, Martin pique distraitement dans la fondue et y perd un bout de pain. Zoé le remarque aussitôt : « Eh eh ! À ton tour d'avoir un gage ! » La jeune femme, survoltée, ne demande pas avis sur la nature dudit gage. Elle baisse d'un même geste vif son pantalon et sa culotte et roule les vêtements en boule aux pieds de sa chaise. Puis elle s'assoit en bordure, écarte les jambes et commande : « Allez, au travail ! Montre-nous ce que tu sais faire ! Lèche-moi, fais-moi jouir ! » Martin ne se fait pas prier, comme s'il n'attend que ça depuis le début du repas. Il s'agenouille et approche son visage de l'amande gluante de sa compagne.
Je me demande s'il n'a pas fait exprès de perdre le morceau de pain et si toute cette soirée n'est pas un coup monté par les deux couples. Tous les quatre doivent être des exhibitionnistes en goguette. Je ne vois pas comment il peut en être autrement.
Martin colle son nez à la vulve, la hume, et donne de rapides coups de langue sur le pourtour, comme pour défriser les poils. De chaque côté de la fente où perle son excitation, Zoé laisse chacun admirer de petites lèvres presque violettes. Son odeur de coquillage monte jusqu'à mes narines. L'association du fromage et de la moule, quelle fragrance ! Mais cela n'incommode pas Martin, semble-t-il…
Zoé soulève si bien ses fesses qu'on distingue jusqu'à son petit trou. Un œillet noir, froncé, serré, presque austère. Pour le détendre, le faire sourire, rien ne vaut une bonne sucée... Martin, qui donne de grands coups du plat de la langue, semble vouloir relier d'une traînée de salive le clitoris à l'anus. À la place de Zoé, j'aurais apprécié qu'un doigt s'insinue derrière et que les coups de langue se concentrent sur la petite friandise placée devant. Mais à chacune ses préférences ! Martin doit savoir ce qui fait le plus plaisir à sa compagne...
Éric, qui quitte seulement des yeux la fellation prodiguée par Alice, observe quelques minutes le cunnilingus voisin. Chiche qu'il pense à la même chose que moi ! Pourtant, il s'exclame : « Trop facile de mettre en place des gages au sein des couples ! Ce qu'il faut, c'est intervertir ! Qu'Alice prenne la place de Zoé et Zoé celle d'Alice ! Voilà ce qui serait réellement un gage ! » Est-ce une plaisanterie de sa part ? Je ne perçois rien dans l'intonation de sa phrase qui laisse présager une absence de sérieux. Alice sort la verge de sa bouche. Martin cesse ses coups de langue. Personne ne souffle mot. Comment les filles vont-elles réagir ? Et leur homme ? Zoé et Alice se regardent. Elles semblent sceller un accord sans avoir échangé une parole. Zoé se lève et se coule le long des jambes de Thibaud. Les gestes sont synchronisés, car au même moment, Martin se place entre les jambes d'Alice qui s'est assise après s'être débarrassée de ses vêtements.
Les succions reprennent, de part et d'autre, accompagnées de bruits mouillés. À un détail près : la chatte d'Alice sent moins fort. Je respire mieux.
Comme c'est cochon à regarder ! Je n'avais jusque-là jamais vu un tel spectacle, du moins dans la réalité. Je croyais qu'il n'y avait que dans les films pornos qu'une telle démonstration était possible. Mis à part dans les lieux échangistes, bien sûr. Par chance, je suis aux premières loges. Je jette un œil sur Éric. Je vois une jolie bosse se dessiner, pas de doute : il bande. Ces scènes de sexe oral commencent à m'émoustiller, moi aussi. Ma mouille coule. J'ai envie de lécher et d'être léchée, par Éric, ou par quelqu'un d'autre...
« Tu veux participer ? » me demande Éric. Je me suis trahie en passant la langue sur mes lèvres. Je ne sais cependant quoi répondre sans me dévoiler tout à fait. J'ai besoin d'un prétexte.
Éric est un champion pour me sortir des mauvais pas. Il comprend ma pudeur, c'est pourquoi il laisse tomber un morceau de pain dans le plat à fondue. « Oh, zut ! Mon aussi ! Tu me donnes un gage ? » propose-t-il. À mon tour de lui offrir de laper ma chatte ! J'en frémis. Je déboutonne mon pantalon et descends, comme Zoé un peu plus tôt, tout ce qui me couvre. « Attends, j'ai une meilleure idée qu'un simple cunni », me dit-il. Il me prend la main. Nous nous éloignons de quelques pas, jusqu'au coin salon, et nous nous installons dans un tête à sexe qui nous contentera tous deux. Sa langue s'active directement sur mon clitoris. C'est bon. Au-dessus de lui, je commence à pomper vigoureusement sa verge. Les deux couples qui s'adonnent aux joies du sexe bucco-génital seront-ils tentés de nous imiter ? Il manque des banquettes dans cette pièce pour satisfaire à toutes les envies..
Mais peu importe, je ne m'occupe plus d'eux. Je ne pense qu'au plaisir que je prends et à celui que je donne. C'est tellement bon que je crains de serrer sa verge un peu fort, de la mordre. Éric a un don pour mignarder mon clitoris. Sa langue frétille, je ressens de courtes décharges électriques. C'est le moment qu'il choisit pour introduire l'index dans le vagin et le pouce dans l'anus. Cette pince-là est sa botte secrète pour me mener à l'orgasme. Je râle. Il sait s'y prendre, le salaud ! Je ne veux pas être en reste : je gobe sa verge jusqu'aux couilles. Un peu trop profondément cependant, car elle me chatouille la glotte. Et soudain, c'est le haut-le-cœur...
***
Samedi 28
Je me réveille. Il fait jour dans la chambre. Éric enfile un sweat polaire.
« Il est quelle heure ? » C'est seulement en prononçant cette question que je me rappelle la débauche devant la fondue... jusqu'à mes vomissements. J'étais tellement barbouillée ! Je me sens encore nauséeuse. J'ai eu raison d'émettre des doutes sur la fraîcheur du fromage !
Éric vient m'embrasser. « Je te propose de rester au chaud ce matin. Je te monte ton petit-déj et file faire quelques descentes. Ce serait bête d'être aux 7 Laux et de ne pas profiter de la neige ! On se retrouvera pour le déjeuner. Vers 14 heures, ça t'ira ? » J'acquiesce. Je me sens trop mal pour skier et je n'ai pas envie d'être un poids pour Éric. C'est son cadeau, ce week-end, et j'ai déjà suffisamment gâché la veillée...
« Cela a fini comment, hier soir ? » questionné-je. « Après le sexe buccal, ils en sont venus à des pénétrations, un coup l'un, un coup l'autre, voire tous en même temps. Cela a commencé sur la table, après avoir débarrassé la fondue, et ils ont terminé dans les chambres. On est tombé sur des voisins mélangistes... » Je n'ose pas demander s'il n'a fait que regarder. Mieux vaut que je chasse cette idée de ma tête. Je sais qu'Éric m'aime et qu'il ne fera rien sans moi et sans mon consentement. Enfin, je le crois...
Le chalet se vide. J'entends la porte d'entrée se refermer, puis c'est le silence. Je grignote une tartine. Je me sens subitement mieux, presque sereine. Je me lève et regarde par la fenêtre. Le ciel est bleu. Ce sera une belle journée. Je m'étire, et soudain je comprends. Ou plutôt, je devine. Il faut que j'en sois sûre. Je prends une douche, m'habille et sors.
De retour dans la chambre, j'ouvre la boîte et lis la notice. Uriner, attendre trois minutes et lire le résultat. Ce sont trois longues minutes qui s'égrènent. Je n'ose d'ailleurs pas regarder trop tôt, de peur que le résultat s'affiche plus tard que ce qu'affirme la notice. Je me force à patienter deux minutes de plus. Et une minute encore, de peur d'avoir mal compté.
Sur le test, les traits roses confirment que je suis enceinte. Je suis tellement émue que les larmes se mettent à couler sur mes joues. Cela explique l'humeur maussade, la fatigue, la nausée... les envies de sexe ?
Il me reste une heure avant le retour d'Éric. Je trouve une serviette de table en papier coloré, y emballe le test, scotche l'ensemble et dessine un cœur par-dessus. Le cadeau que je lui ai offert ? Un week-end en montagne, formule tout compris. Le « tout » prendra un sens nouveau lorsque je lui remettrai ce paquet.